Après une courte halte à Lisbonne, le voyage continue à Evora. Située dans l’Alentejo, cette vieille ville a su conserver ses vestiges contre les vertiges de l’Histoire. Le centre, ceint par une muraille du Moyen-Âge, semble encore vivre à l’heure antique, et ses rues, ses venelles, aux contrastes saisissants sous le soleil enhardi réservent leurs fraîches haleines aux fins de journée, lorsque les passants en timides enjambées, amorcent le premier pas.

Il va sans dire que peu de gens se risquent à se promener pendant le jour. Les températures y sont si élevées que le moindre mouvement vous transforme en éponge suintante malgré les coups de brise. Chaque pas, chaque souffle requiert quelques décilitres d’eau, et il suffit que le vent vous fausse compagnie pour transformer la plus charmante ruelle en fournaise infernale. Mais les connaisseurs ou les touristes n’ont cure des précautions; Evora doit être découverte, de jour comme de nuit, elle offre sa féconde à ses rares visiteurs. Je me suis mis alors en quête de silhouettes :

D’autres personnes se prêtent à des photographies sur la place haute, là où reposent les ruines d’un ancien temple romain dédié à Diane.

Plus bas, sur la grand place, les gens se retrouvent autour de la fontaine. L’air y est plus frais et les larges ombres projetées donnent un peu de répit à ceux qui traverse la ville d’un bout à l’autre. Je me tourne et je cadre. J’aime l’idée de superposer les plans, de mêler minéral, humains et animaux. Il y a comme une fusion, une confusion.

Sous les arcades, le zéphyr est absent. On y étouffe gaiement, alors que les échoppes déversent leur frissonnant air réfrigéré. Je regarde les arches, leurs douces courbes ainsi projetées sur le sol, et faisant face à la violence du contraste. Je me prépare à photographier et puis passe au fond une silhouette gracieuse qu’une simple pression du doigt permet de saisir - l’instant.

C’est toujours vers les hauteurs que mes pas me portent. La grande terrasse face au temple, livre aux regards songeurs une scène magnifique de soleil couchant. Les rais de lumière paraissent chatouiller les horizons, alors que le ciel s’embrase comme un feu de raku, prenant successivement toutes les teintes de rouge. Et c’est au cours de cette déclinaison d’une langue encore inconnue, que je cueille ma dernière image.