Yixing, Au dessus du pont

Les contrastes sont saisissants en Chine, et rivalisent entre eux rarement. Les multiples facettes de ce pays immense interrogent sur l’équation complexe qui organise les continua qui s’offrent à la vue du voyageur. Tant de diversités maintenues dans un seul espace, une seule époque, soulèvent l’étonnement, l’admiration et parfois un profond malaise.

Hangzhou, Préparation du G20

Observateur ordinaire, je m’y suis promené perplexe et singulier espérant toujours trouver le dénominateur commun à une nation, et toujours me heurtant à l’incroyable richesse des cultures qui s’y sont déployées. On pourra m’objecter : comment peut-on résumer, voire réduire, la complexité d’une nation à une unique donnée? Cela relève bien sûr plus du jeu personnel, que d’une véritable étude de terrain, alors pourquoi ne pas s’y adonner puisque le plaisir y est? Flâner, aller à la rencontre des lieux et des gens, pénétrer une sordide venelles bordées de rats et d’urine, ou monter les marches couvertes d’un tapis rouge dans un centre luxueux; se hasarder à goûter un thé vert dans une petite échope où l’on vous sert sur une magnifique table en bois, écouter le bruit des machines dans le fracas des rues, saisir l’opportun silence d’été d’une cave fraîche dans la montagne.

Luoyang, Joueur d’harmonica

Ce qui frappe au premier abord, c’est la dimension des villes. Chacune abrite des millions d’habitants et leurs banlieues ressemblent à des fôrets de gratte-ciel tout plus ou moins identiques. L’ennui gagne rapidement le marcheur qui veut quitter la ville. En prenant un bus, tout va un peu plus vite, mais on se lasse bel et bien de l’architecture moderne qui gâte le paysage, voire l’enlaidit. Mais le photographe certainement, trouvera là matière pour dénoncer l’uniformité et la répétition, sans dérision. Toutefois, il serait inadmissible de passer outre sur le fait que les chinois sont très ouverts, très aimables et curieux. La barrière de la langue semble renforcer les liens. La patience et le sang-froid légendaire des chinois que j’ai croisés pour mille et une raison, m’ont toujours positivement surpris.

Yixing, Le nettoyeur

Il y a la Chine des quartiers aseptisés, où l’on se demande si l’on n’est pas à New York ou à Miami, où la brise convie des parfums neutres d’une mondialisation trop connue; il y a la Chine des tréfonds populaires, où la noirceur des murs côtoie les odeurs acariâtres de pisses, de bouillons chauds et d’essence rancie et d’un mélange peu ragoûtant de tout, et où la vie ne semble pas avoir déserté les rues pour les centres commerciaux. Les espaces publicitaires ont envahi l’environnement urbain, et les téléphones portables sont au rendez-vous des moments heureux. Les enfants n’ont pas totalement abdiqué et apprécient encore les moments d’être, où le souvenir n’est pas un devoir mais une madeleine.

En attendant l’Eden

Il arrive que l’on se retrouve au milieu de scènes disparates où les histoires se multiplient. C’est presque toujours le cas dans les villes qui ont gardé le charme de la tradition. Il est aisé alors d’identifier le lieux et l’époque pour peu que l’on fasse attention aux détails.

Le mangeur de riz

La vendeuse de galettes

Short ou jupe?

C’est assez délicat pour être noté. Pendant mon séjour, j’ai vu souvent des pères porter leur enfant dans les bras. Comme ici sur la photo, la posture est naturelle. Il y a une harmonie dans ce contact singulier que l’on ne retrouve que rarement en Europe.

Père et enfant

Les enfants chinois sont très indépendant. Du moins, ceux que j’ai rencontrés sur mon chemin. Beaucoup se promenaient librement dans les rues, parfois à des âges où, en France, on les enferme dans des « crèches »; cela ne semblait nullement entraver leur bonhommie et gaieté, ni leurs appétits. Comme sur la photo suivante, les soirs sont chargés dans les quartiers de certaines villes. La vie semble exploser autour des marchés qui se chargent de denrées périssables et avalables. Les odeurs de fritures, alliées aux grondement de l’huile sur le feu, finissent par emplir les rues, jusqu’à déborder hors des limites des zones piétonnes, devenues des jungles de rires et de complicités. La pauvreté cependant, n’est jamais très loin et nombre de clochards font les poubelles.

Soeur et frère

Quand je reviens rétrospectivement sur mes photographies de Chine, j’ai le sentiment qu’elles sont intemporelles. Ce ne sont pas tant les sujets que les détails - qui parsèment le canevas de l’espace du grain d’argent - qui donne cette impression de continuum, d’ininterruptions, de pensée continue qui permet de passer d’une chose à une autre sans contestation. En un sens, il n’y a pas de paradoxe dans cet empire qui semble illimité, la pensée bouddhiste de l’impermanence fournit sur ce plan une réponse simple sur les changements : leur existence est un fait. Ce trait de fatalisme n’est pas donc pas définitivement propre à la Chine. Beaucoup de pays d’Asie acceptent l’évolution sans soulever d’indignations dans une forme d’acceptation silencieuse. Et c’est peut-être ce constat qui dérange, et qui effraie, dans le cas de la Chine, de part ses capacités à créer des bouleversement gigantesques. S’il est vrai que je m’extasie devant la splendeur de son art et de ses traditions, l’outrance de sa modernisation pèse un peu sur ma conscience, sans que d’ailleurs, j’y puisse grand-chose.

Fatalisme et développement durable sont-ils conjointement possibles?

Voici le reste des photographies que je souhaitais montrer. Bonne revue!

Enfants perdus dans les voeux

Dengfeng, Céramiques à Dengfeng

Derrière le pont

Boutique de raviolis

Promenade au lac de l’Ouest

Ganzi, La bergère de yaks

Hangzhou, En traversant la rue